Le compte joint : pratique mais pas sans risque

Même s'il ne leur est pas exclusivement destiné, le compte joint fait souvent partie de la vie quotidienne des gens vivant en couple. On estime que 3 couples mariés sur 4 environ sont titulaires d'un tel compte. Le compte joint n'est pas limité au compte bancaire et présente d'indéniables atouts de gestion, mais il est à manier avec précaution.

Principe du compte joint

"et" ou "ou" : le petit mot qui fait toute la différence

Le compte joint est libellé au nom de tous les participants. En théorie, comme pour tout compte indivis, chaque opération effectuée à partir du compte nécessite l'accord de tous les titulaires. En pratique, la mention "ou" est le plus souvent adoptée, de telle sorte que chacun peut faire fonctionner le compte sous sa seule signature comme s'il était le seul titulaire du compte.

Unies ou non par un lien de parenté, deux ou plusieurs personnes peuvent ouvrir un compte joint. Il permet à chacun des signataires d'effectuer - sans l'autorisation des autres - toute opération sur le compte. Il n'existe aucune limite légale au nombre de cotitulaires. Les banques peuvent toutefois les restreindre à 4 ou 5.

La formule du compte joint n'est pas limitée au compte courant. Elle peut très bien s'appliquer à un livret d'épargne bancaire ou à un compte-titres. En revanche, elle n'est pas autorisée pour le livret d'épargne populaire, le livret A, l'épargne-logement ou encore le plan d'épargne en actions.

Avantages pratiques et économie de frais bancaires

"Pratique pour gérer l'argent du ménage", c'est le principal argument avancé par les couples qui adoptent le compte joint et par les banques qui les incitent à le souscrire. Au quotidien, le compte joint peut permettre d'éviter les comptes d'apothicaire pour le partage des frais fixes (loyer, EDF, impôts locaux, etc.) et des dépenses de la vie courante. Une seule signature suffira pour effectuer toutes les opérations. Le compte joint est également un moyen de freiner l'inflation des frais bancaires en limitant, par exemple, les cotisations aux conventions de compte et aux cartes bancaires. Des atouts indéniables dès lors que le fonctionnement du compte joint repose sur une confiance mutuelle et une bonne entente entre les cotitulaires.

Incidents de paiement et responsabilité

Le principe général est que chaque cotitulaire dispose de l'actif du compte, sans pouvoir dépasser cette limite. Les cotitulaires sont donc solidaires et tous responsables du débit envers la banque. Lorsque celle-ci décidera une interdiction bancaire, elle s'appliquera à tous les titulaires du compte et pour l'ensemble des comptes détenus : compte joint et compte(s) bancaire(s) détenu(s) par ailleurs.

Pour éviter que l'interdiction ne "contamine" tous les comptes, les titulaires du compte joint peuvent désigner auprès de leur banque, et d'un commun accord, celui d'entre eux qui sera tenu pour responsable en cas d'incident de paiement. Si cette faculté est utilisée, la personne désignée devient interdit bancaire sur le compte joint et sur les autres comptes dont elle pourrait être éventuellement titulaire, quel que soit le véritable émetteur du chèque sans provision. Dans ce cas, l'interdiction bancaire touche également les autres cotitulaires mais uniquement en ce qui concerne l'utilisation du compte joint.

La gestion d'un compte joint nécessite donc une concertation constante entre les cotitulaires. Ceux-ci doivent notamment s'assurer que le compte est suffisamment approvisionné avant de faire une dépense importante. Bien évidemment, fermer ou dénoncer un compte joint est fortement conseillé dès lors que l'entente entre les cotitulaires bat de l'aile ou que des dérapages sont constatés.

Dénonciation de la convention

Obligation d'information de la banque

En cas de dénonciation d'une convention de compte joint, la banque a l'obligation d'informer les autres cotitulaires de cet événement. À défaut, elle commet une faute entraînant la mise en jeu de sa responsabilité. De même, informée de l'ouverture d'une succession, la banque a l'obligation de faire connaître aux héritiers l'existence de comptes joints dont le défunt était titulaire (voir ci-dessous, le sort du compte joint en cas de décès).

À tout moment, un cotitulaire peut restreindre l'utilisation libre et illimitée des fonds ou dénoncer totalement la convention régissant le compte joint. La demande doit être faite auprès de la banque qui doit en informer les autres cotitulaires. La dénonciation place le compte joint dans la situation d'un simple compte en indivision : son utilisation sera bloquée puisque la banque honorera les paiements uniquement avec l'accord de tous les signataires et les prélèvements automatiques seront normalement arrêtés. Une telle opération débouche le plus souvent sur la clôture du compte joint - opération qui nécessite la signature de tous les cotitulaires - et l'ouverture d'un compte individuel à chacun d'entre eux.

Appréciation de la part de chacun des cotitulaires

En cas de clôture, sauf preuve du contraire, les sommes déposées sur un compte joint sont présumées appartenir à chaque cotitulaire pour une part dite "virile", autrement dit pour moitié chacun, dans le cas de deux cotitulaires.

Sort du compte joint en cas de décès

En cas de décès d'un des cotitulaires, le compte joint n'est pas bloqué par la banque et il peut continuer de fonctionner sous la signature des cotitulaires survivants. Le compte joint a donc ici un avantage sur le simple compte individuel assorti d'une procuration, lequel serait automatiquement bloqué au décès de son titulaire. En revanche, les héritiers du cotitulaire décédé ne peuvent normalement pas faire fonctionner le compte. En pratique, certaines banques peuvent autoriser des retraits mais uniquement dans la limite de leur part héréditaire. Le plus souvent, en accord avec les intéressés, elles provoquent le partage et l'ouverture d'un autre compte.

Dans le cadre de circonstances particulières, les héritiers peuvent néanmoins demander à la banque de bloquer un compte joint s'ils éprouvent des inquiétudes sur le sort des avoirs qui doivent leur revenir. Pour les comptes détenus entre époux, une des parades fréquemment conseillées pour éviter ce genre de complication est de prévoir par testament que le compte joint soit dévolu en totalité à l'époux survivant. Cette mesure qui constitue un legs doit naturellement prendre en compte les droits des autres héritiers.

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