Micro-entreprise ou auto-entreprise ? |
Le statut d'auto-entrepreneur est l'une des innovations marquantes de la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, dite "loi ÂME", à grands renforts de communication de la part du gouvernement. Le terme d'auto-entrepreneur ne figure pourtant pas dans le texte de la loi. La loi LME contient avant tout des aménagements d'un régime existant, celui de la micro-entreprise, en instaurant un nouveau régime social et fiscal spécifique. L'auto-entrepreneur s'inscrit dans ce cadre de la micro-entreprise mais il bénéficie en plus de règles juridiques assouplies dont notamment l'absence d'immatriculation dès le démarrage de l'activité. La micro-entreprise : un cadre fiscal et social privilégié pour démarrer une activité Mis en place en France au début des années 90, le régime fiscal de la micro-entreprise concerne uniquement les entreprises individuelles soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou celle des bénéfices non commerciaux (BNC). Dans le premier cas, on parlera de régime micro-BIC, dans le second, de micro-BNC. Dans les 2 cas, il s'agit d'un régime d'imposition simplifié entraînant une simple déclaration du résultat sur lequel est appliqué un abattement forfaitaire représentatifs de frais. Par ailleurs, les obligations comptables de ces micro-entreprises sont allégées.
Pour bénéficier de ce statut, le chiffre d'affaires de l'entreprise ne doit pas excéder :
Les abattements pour frais avant imposition sont respectivement de 71 %, 50 % et 34 %. Afin de tenir compte d'une activité souvent irrégulière en phase de création et pour simplifier la vie des micro-entrepreneurs, les pouvoirs publics ont imaginé par le passé plusieurs solutions afin d'alléger leurs prélèvements obligatoires ou de les rendre plus supportables. Avec les dispositions de la loi LME, le gouvernement maintient cet objectif, l'idée étant de rendre ces prélèvements plus en adéquation avec l'activité immédiate de l'entreprise. Ainsi a-t-il été mis en place un nouveau régime optionnel de prélèvement :
Appelé couramment "micro-social", ce nouveau régime, réservé aux entreprises individuelles soumises au micro-BIC ou au micro-BNC, consiste en un versement libératoire des cotisations sociales, mensuel ou trimestriel (au choix de l'entrepreneur), calculé proportionnellement aux revenus d'activités effectivement encaissés pendant la période correspondante. Par rapport au régime normal, le long décalage entre la perception des revenus et l'acquittement des charges sociales correspondantes se trouve donc ainsi supprimé. Le taux du versement libératoire est de :
L'option pour ce régime doit être formulée auprès de la caisse du régime social (Régime social des indépendants) au plus tard le 31 décembre de l'année précédant celle au titre de laquelle elle est exercée. En cas de création d'entreprise, elle doit être formulée au centre de formalités des entreprises (CFE) avant le dernier jour du troisième mois qui suit la création. L'option peut être dénoncée à tout moment mais elle s'appliquera de toute façon pour des années entières. Le régime est aussi suspendu dès lors que les conditions ne sont plus remplies, notamment en cas de dépassement des limites de chiffres d'affaires.
Comme pour le dispositif de prélèvement des charges sociales évoqué précédemment, l'option pour ce nouveau prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu présente l'avantage de supprimer le décalage de plus d'un an entre la perception des premiers revenus et leur imposition effective.
Le dispositif est uniquement réservé aux entreprises individuelles soumises au micro-BIC ou micro-BNC ayant également opté pour le micro-social, l'inverse n'étant pas possible. En outre, cette option complémentaire est soumise à une condition de ressources. En effet, elle peut être exercée dès lors que le montant des revenus du foyer fiscal de l'avant-dernière année n'excède pas un certain montant révisé chaque année : 25 195 € pour 1 part de quotient familial en 2009 + majoration de 50 % ou 25 % par demi-part ou quart de part supplémentaire, voir tableau ci-contre. En pratique, comme pour le régime micro-social, l'option doit être adressée à la caisse RSI (régime social des indépendants) dont relève l'intéressé au plus tard le 31 décembre de l'année précédant celle au titre de laquelle elle est exercée. En cas de création d'entreprise, elle doit être formulée au CFE avant le dernier jour du troisième mois qui suit la création. Il faut savoir qu'au titre de l'année 2009, les travailleurs indépendants en activité au 01.01.2009 ont pu opter pour le nouveau dispositif jusqu'au 31.03.2009. Le versement libératoire de l'IR est calculé, sur le montant HT du chiffre d'affaires ou de recettes réalisé au titre du mois ou du trimestre précédant, au taux de :
Si l'exploitant n'a réalisé aucun chiffre d'affaires ou aucune recette au titre du mois ou du trimestre de référence, il n'est tenu à aucune déclaration. L'année suivante, l'exploitant devra se contenter de reporter sur sa déclaration de revenus le montant de son chiffre d'affaires total annuel (voir exemple).
L'auto-entrepreneur : un micro-entrepreneur bénéficiant d'une dispense d'immatriculation Pour le gouvernement, l'instauration du statut d'auto-entrepreneur répondait à deux objectifs :
Juridiquement, même si l'exprit de la loi était d'encourager le développement d'une activité complémentaire, rien n'empêche l'auto-entrepreneur d'exercer son activité à titre principal. Dans tous les cas, il peut ainsi entreprendre :
Le statut d'auto-entrepreneur est réservé uniquement aux micro-entrepreneurs ayant opté pour le régime micro-social évoqué précédemment. En revanche, l'option pour le prélèvement forfaitaire de l'impôt sur le revenu n'est pas nécessaire. Cette dissociation a son explication. En effet, conçu pour faciliter l'exercice d'une activité complémentaire, l'auto-entrepreneur peut, dans biens des cas, du fait de son activité principale, dépasser le plafond de revenus exigé pour ce mode de paiement de l'impôt sur le revenu.
La principale spécificité de l'auto-entrepreneur, par rapport à tout autre micro-entrepreneur, est l'absence d'immatriculation de l'activité, rendue possible par la loi LME. Une simple déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises suffit à lancer l'activité. En ce sens, l'engouement pour ce statut (150 000 inscriptions entre janvier et mai 2009) est donc logique. Mais l'auto-entrepreneuriat fait gronder les fédérations professionnelles, la Chambre des métiers de l'artisanat en tête. En effet, les personnes physiques exerçant une activité commerciale ou artisanale sont normalement soumises à l'obligation de s'immatriculer au Registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Pour les artisans, cette inscription s'accompagne même d'un stage préalable obligatoire. Ces obligations sautent pour l'auto-entrepreneur, ce qui a pour conséquence, selon l'APCM (Assemblée permanente des chambres de métiers de l'artisanat), de le maintenir "en dehors de toute possibilité d'accompagnement, de formation et de qualification, de développement". Certes, le Secrétariat d'Etat aux PME rappelle dans son dossier de présentation du statut que les exigences en matière de qualifications professionnelles pour l'exercice de certaines activités et en matière d'assurances professionnelles sont maintenues pour les auto-entrepreneurs. Mais, de façon générale, les représentants des artisans, les professionnels du bâtiment ou encore certaines professions libérales pointent du doigt les dérapages possibles du fait du manque d'encadrement de ces nouveaux acteurs :
Certaines fédérations professionnelles vont même jusqu'à parler de concurrence déloyale, du fait d'un léger avantage en faveur de l'auto-entrepreneur sur le plan des charges sociales ou encore d'obligations comptables allégées. Le gouvernement a promis une mission d'évaluation du statut de l'auto-entrepreneur et des ajustements pour tenir compte des craintes des fédérations professionnelles. L'APCM propose notamment que le dispositif, hors les très petits chiffres d'affaires relatif à un complément d'activités, soit limité dans le temps. Afin de replacer le dispositif dans son esprit initial et dès lors qu'il s'agit de développer une activité principale, le statut d'auto-entrepreneur aurait donc plutôt vocation à fonctionner comme un sas ou un marchepied pour expérimenter un projet mais ne serait pas un statut social pérenne.
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